On se demandait si Basile allait arriver avec la voiture ou pas, qu'on ai pas besoin de trimballer notre magnifique chaise. Il est arrivé, et c'est avec joie qu'on a sorti nos affaires du coffre, sous l'objectif de Florent... "T'as oublié d'enlever le cache !" Passons par l'entrée des artistes, bienvenue au Relais, c'est grand, c'est rouge, c'est beau, c'est encore vide. C'est encore vide mais on a déjà l'impression d'être le centre du monde. On en finit pas de s'extasier devant le nombre de siège, devant la taille de la scène, les ombres nettes et sans défaut... et je ne vous parle même pas des nos loges ! On se serait crus dans un Taratata Bonus, miroirs le long des murs avec des spots et des rebords pour poser notre bordel à maquillage. Une pièce centrale avec une table qui disparaît sous la montagne de paniers-repas de la cantine, une salle de bains qui pue mais c'est pas grave, un petit salon avec le canapé qui a abrité les siestes de Jean. Grands rideaux, coulisses qui n'en finissent plus de profondeurs, et un tas de trucs indéfinissables, de câbles, et au milieu, un grand piano qui a gardé les empreintes de plusieurs paires de mains. Des scènes par-ci, des impros par-là, et Mike toujours derrière sa guitare, nous assurant une bande son qui collait toujours parfaitement à notre émotion. Un filage complet à partir de 11:00 (j'avais faim depuis 9:45) qui a duré jusqu'à 13:00, un pique-nique dans le parc, merci Baldrik pour le saucisson. Un peu d'air entre deux imprégnations de l'ambiance calfeutrée, si chaude, de la grande salle du Relais. Une répétition en conditions spectacles, quelques films et photos, des délires avec Florent, pour lequel j'ai opté pour le "tu". "Allez, ça va être super, vous verrez. Maintenant, on se repose, et on économise sa voix." Tu parles ! Au lieu de la méditation, on a choisi de danser et de crier comme des dingues. Et puis il se fait tard. On essaye le stroboscope, c'est hallucinant, et on va se préparer. Vestiaire commun "Ils sont où les gars ? Merde... c'est la même pièce. Je croyais qu'en changeant de porte j'allais changer de pièce.", maquillage, coiffage, et on parle de n'importe quoi. Ils sont pervers, ils sont scatofiles, et je les aime. "A 20:00, tout le monde est dans les coulisses, on bouge plus et on fait pas de bruit en attendant que le public s'installe." Il est 20:00. Y a une file d'attente énorme. On a déjà le coeur dans les chaussettes. Un coup d'oeil entre les deux scratchs du rideau, "Lise y a ton mec !", et ça se remplit, ça se remplit, ça se remplit, allez on se cache ou on va se faire repérer. Plus que dix minutes. On stresse tous en choeur, je sautille sur place. Les dix minutes se sont transformées en vingt sans qu'on s'en rende compte, Florent et Monsieur Delabasse n'en finisse pas de nous encourager, et ça y est. C'est l'heure. La musique monte, monte, monte, et ça commence.
Justine et Erika s'échappent du rideau, ils sortent de partout, mes joyeux théâtreux, et ils se mettent à jouer, non pas à jouer la comédie, mais à jouer, comme des enfants, au ballon, aux Barbies, à l'élastique, à la marelle ou au loup. Je les laisse crier un peu. "Faites du bruit", c'est la consigne. Et je décide que le moment est venu. Doucement, lentement, j'entre sur scène, mon bonnet d'âne enfoncé sur les oreilles, les yeux rivés sur mes chaussures. Je serre mes mains d'enfant honteuse et le nez rentré dans mes épaules, je tourne la tête. Et le public s'étend, loin, loin, haut et on n'en voit même pas le fond. La salle est remplie. C'est pour nous. J'effectue ma traversée, et le spectacle est lancé pour de bon. De l'énergie, des couleurs, de la lumière, on est beaux et on assure. Les premières minutes sont déjà parfaites. On est déjà contents et Florent garde sa caméra rivée sur nos joies expressives. Le temps s'accélère, passe plus vite que jamais. C'est rapide, trop rapide, on savoure chaque réplique et on voit les scènes défiler. "Est-ce que nazi est là ?", mes claques font de nouveau du bruit, et je suis tellement fière d'avoir réussi que j'en oublie de sourire dès le début. On se délecte du jeu de nos partenaires, et sur scène, on prend un vrai plaisir à bondir et à crier. Les lumières là haut résonnent encore à ma rétine. "Que revienne l'arc-en-ciel", oui qu'il revienne, il a brillé si peu de temps. Mais éternellement. "Nous garderons de ces temps passés, l'ineffable nostalgie qui rattache toujours l'homme à la source perdue de son enfance." C'est fini, c'est fini, et on est heureux. Nous créons l'arc-en-ciel, on salue, les gens sont debout, ils applaudissent plus que jamais. On chante une dernière fois, et Monsieur fait son discours. Si je n'avais pas été sur scène, j'aurais laissé mes larmes couler sur mes joues. C'était merveilleux.
D'entendre vos voix, déjà je me sens mieux. De vous écouter encore, vous les théâtreux, les amis rêveurs, ça me fait rêver.