Jeudi 19 avril 2012 à 14:16

Je n'ai pas mis les pieds à Besançon depuis le 9 octobre. Cela fait six mois que je dis à Ségolène et Doriane que je ne me sens pas capable d'y retourner si je ne peux pas y voir Mathieu, qu'il faudra que j'attende qu'il soit disponible. En fin de compte, le mois de juin arrive assez vite. Mais en fait, je ne veux plus attendre. Besançon, c'est toujours chez moi. Monsieur m'a peut-être bannie de sa vie, mais pas de ma ville. Et finalement, il ne représente qu'une infime partie de ce que j'ai vécu là-bas. Le moment est venu où je sais que je n'ai pas envie de le voir, mais que par contre je meurs d'envie d'arpenter les rues que je connais si bien, de retrouver le ciel et les arbres et les collines et la rivière-fleuve, et de revoir Ségo. Et de prendre le bus 8 direction Campus, de regarder True Blood dans la maison de 9m², de sortir là où je sais qu'on va s'amuser, de recroiser les habitués du Bodega qui avaient fini par me reconnaître même si je ne dansais pas, de retrouver la pierre blanche-grise des immeubles pas très hauts, de savoir où on peut acheter quoi, et les paninis du parc Granvelle, et toutes les autres conneries, et les places et les bancs en forme de fleurs, et le soleil, toujours le soleil.
Dans 9 jours, j'y retourne.

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Mars 2011, sous la citadelle. Un jour, j'étais blonde.

Vendredi 13 avril 2012 à 13:35

Voilà, ça y est, j'ai à nouveau une réputation d'obsédée auprès de mon cercle privé. C'est cool, j'aurais tenu sept mois avant que le naturel ne revienne au galop.

Je saute une ligne qui correspondrait à l'oral à un silence accompagné d'un regard affligé. Il faut dire que je ne l'ai pas volé ; "on a la réputation qu'on mérite". Mais en même temps, c'est insupportable de faire semblant d'être prude, ou même seulement timide, ou encore non-concernée par la question. Maintenant qu'on commence à se connaître vraiment bien, je ne cherche pas à leur cacher ma vraie nature (à mon cercle très très privé seulement, bien sûr. Enfin quoi que...). Et puis je parle trop, il faut le dire. Dans un cours de psychanalyse sur les pulsions, c'est foutu, je ne peux pas me la fermer. Il faut toujours que je rattrape la situation avant qu'elle ne dérape et que j'aie l'air de la fille qui a tout vu, tout fait, et qui s'en vante. Alors évidemment, je ne suis pas la seule à raconter des conneries. Il suffit de quelques phrases (par exemple conclure un moment de gloussement général à l'évocation d'acteurs torses nus en assénant la triste vérité que personne n'ose énoncer : on est des "pauvres meufs qui ont pas vu un homme nu depuis mille ans") et d'une rose de Jericho sur le mur pour que les amis se tournent vers moi d'un air taquin dès que le sexe entre un tant soit peu dans nos sujets de conversations.
Bon, je suis en train d'écrire complètement n'importe quoi là, je m'exprime pas de manière très claire. Mais enfin si vous avez compris l'idée, on peut passer à un autre sujet. Puisque justement, je suis en train de retrouver une situation dont j'avais l'habitude à une autre époque, avec d'autres personnes, parlons-en, des nouvelles habitudes. C'est un truc qui me fascine, quand on commence à se créer des petites habitudes agréables. Par exemple, le rituel du café. Depuis cette année, il ne se passe pas un jour sans qu'on aille chercher notre petit café à la machine après manger, voire également à la pause du matin quand le démarrage est difficile, ou à la pause de l'après-midi quand on doit encore tenir éveillé jusqu'au bout. Je me suis habituée au point d'avoir besoin de ma propre cafetière à l'appart', parce que ce n'était plus possible de boire du thé après le déjeuner ("déjeuner", tiens, voilà un mot tout à fait normal qui pourtant ne figurait pas dans mon vocabulaire il y a quelques mois). Et je me retrouve à prendre un plaisir fou à inviter mes amis à prendre le café, à savoir qui ne prend pas de sucre, qui ne prend pas de café du tout, et à les voir prendre leurs aises. "J'ai un nouveau café, vous voulez le même que d'habitude ou un moins fort ?" "Ah non non, le même que d'habitude.". Juste parce qu'ils connaissent mon café et qu'ils l'apprécient, je jubile. Et je jubile d'autant plus quand je vois les gens passer de debout, à une chaise, à vautrés sur le lit. C'est complètement niais, mais j'aime la familiarité et j'aime quand elle se voit au quotidien dans de petits détails.
On en arrive au moment où je suis assez contente parce que je viens d'écrire pour la première fois quelque chose qui me paraît un des principes fondamentaux mêmes de mon existence relationnelle. 

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Mercredi 11 avril 2012 à 17:07

 M'inviter chez Nikita complètement à l'improviste, comme ça à 18:00 envoyer "Tu fais quoi ? Je peux venir ?" et annoncer trois minutes plus tard "Je suis dans le tram". Traverser la ville à minuit dans l'avant-dernier tram pour rentrer et apercevoir Chloé à sa fenêtre, le casque sur les oreilles, fumant sa dernière cigarette. Manger avec les copines à midi même si je n'avais pas cours, rentrer chacune chez soi avec pour objectif de travailler sérieusement. Préparer un café avec deux Speculoos, m'installer sur le lit avec We Are l'Europe sur les genoux, en me disant que je bosserai en fin d'après-midi. Recevoir à 16h45 un message de Margaux : "On va chez Ikéa avec Juliette, tu veux venir ?". Ca n'a pas de prix.

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